Réhabiliter la Milady des Trois Mousquetaires de Dumas ? Il fallait oser … elle l’a fait ! Je vous parle de Je voulais vivre, le dernier roman d’Adélaïde de Clermont-Tonnerre, publié chez Grasset et Prix Renaudot 2025. Un livre de qualité, divertissant et bien écrit, qui m’a séduit sur la forme mais gênée dans la démarche.
De quoi parle ce livre ?
Revisiter Milady de Winter, l’odieuse intrigante qui a hanté des générations de lecteurs des Trois Mousquetaires … avouez qu’il y avait de quoi trembler ! J’ai longuement hésité avant de me lancer dans cette lecture, tiraillée entre des impulsions contraires.
D’une part, une sincère envie de découvrir le nouveau livre d’Adelaïde de Clermont-Tonnerre dont j’avais énormément aimé Le dernier des nôtres. Sans parler de l’excitation de lire un roman historique et encore plus un roman de cape et d’épée.
Mais d’autre part, une énorme appréhension à l’idée de voir encore une fois l’oeuvre de Dumas reprise et potentiellement dénaturée. On ne plaisante pas, en ce qui me concerne, avec les Trois Mousquetaires, roman dévoré lorsque j’étais ado, faisais de l’escrime et ne rêvait que d’aventures et de panache.
S’ajoutait à cette crainte celle que l’autrice, avec le biais propre à notre époque, tombe dans le piège d’un discours féministe convenu et anachronique, une Milady « me too » qui abimerait plus qu’il n’enrichirait le personnage.
Bref, vous l’aurez compris, j’y suis allée à reculons mais la curiosité l’a bien évidemment emporté.
Mon expérience de lecture
Alors finalement : ai-je aimé ou pas ? C’est un « oui, mais ».
Oui, il faut reconnaître à Adélaïde de Clermont Tonnerre un vrai talent de conteuse. Son texte est bien écrit, dans un style très adapté à ce type de roman. La plume est précise et sensible, le vocabulaire travaillé pour un ensemble très convaincant. Ajoutons à cela l’émotion qui ressort de ces pages. On sent l’autrice très attachée (peut être trop) à son personnage principal. La démarche est touchante et le propos heureusement ni caricatural ni anachronique. Bref, quand on accepte de se laisser porter, sans comparer au texte initial, le roman offre un joli moment de lecture. Et puis il faut saluer l’audace de s’attaquer à ce monument de la littérature française. Tout le monde n’aurait pas osé.
Mais … Ai-je complètement adhéré à cette relecture du mythe, à cette Milady victime ? Pour être honnête, non. Si convaincante que soit l’autrice dans son entreprise de réhabilitation du personnage, je n’avais pas forcément envie qu’on la réhabilite, moi, cette Milady. C’est un personnage que j’ai aimé détester et je n’ai pas réussi à faire abstraction de l’histoire contée par Dumas. J’aurais pu rester sur mon expérience de lecture positive en me disant que je lisais une histoire différente, originale, si les notes de l’autrice en fin d’ouvrage ne m’avaient pas légèrement contrariée. J’ai été gênée par cette lettre tutoyant l’auteur dans laquelle l’autrice reproche tout un tas de choses à Dumas, l’auteur d’un texte immense qu’il faut replacer dans le contexte de l’époque. Que l’on souhaite écrire une autre Milady en s’affranchissant du texte initial pourquoi pas, mais que l’on parle de rétablir la vérité et de rendre justice à un personnage de fiction m’a dérangée.
En conclusion
Pour finir sur une note positive, Je voulais vivre est un roman divertissant que je recommanderais sans hésiter à un large public. Les puristes de Dumas auront peut-être comme moi des réserves, mais ils apprécieront, me semble t-il, la qualité de la narration et la jolie plume d’Adélaïde de Clermont-Tonnerre.
Avis mitigé sur la version Audible : l’écoute est agréable, mais la lecture m’a semblé souvent trop théâtrale. Dommage car j’avais bien aimé cette lectrice dans Le cimetière de la mer. Ici quelques envolées un peu trop dramatiques m’ont un peu agacée mais rien de rédhibitoire.
Que lire d’autre de cette autrice ?
Lu en octobre 2025
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