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La nostalgie de l’honneur de Jean-René Van der Plaetsen : un Prix Interallié mérité !

29 janvier 2018

J’ai lu le Prix Interallié 2017, La nostalgie de l’honneur de Jean-René Van der Plaetsen, publié chez GrassetUn livre riche et profond qui retrace la vie du grand père de l’auteur, le général Crépin, en même temps qu’il aborde les grands conflits du 20e siècle.  

 

Pourquoi ce livre ?

 

C’est le titre qui m’a immédiatement attirée. La nostalgie de l’honneur … « La nostalgie de l’honneur est un mal étrange, une forme de neurasthénie, très peu répandue de nos jours, qui vous oppresse et vous étreint le cœur par intermittences. C’est une maladie rare, assez romantique, donc pas si grave, mais suffisamment ennuyeuse tout de même pour vous gâcher plusieurs journées par mois une maladie dans laquelle il entre une bonne dose de dépit devant l’observation du monde tel qu’il est et tel qu’il tourne, un peu comme le fut la mélancolie, mal du XIXe siècle. Je le sais, et je puis en témoigner : je souffre de ce mal depuis mon adolescence ».

Voilà qui me parle tellement … Il m’arrive aussi et souvent de ressentir la nostalgie d’une époque que je n’ai pas connue. Une époque où la société était moins nombriliste, le savoir-vivre essentiel et l’honneur une vertu cardinale. Donc bien sûr, je me suis ruée dessus.

 

Ça raconte quoi ?

 

Jean-René Van der Plaetsen vous emporte dans une traversée du 20e siècle dans les pas de son grand père. De Chine en Indochine, de la 2e DB de Leclerc à l’Algérie, ce livre pourrait presque s’apparenter à un grand roman d’aventure. On y découvre un artilleur au sens moral irréprochable, qui mit toute sa vie l’honneur et le service de la France au dessus de tout le reste. Un héros d’un autre temps en somme. À travers son histoire, c’est aussi le portrait de l’armée française qui est brossé, ainsi que celui de ceux qui l’ont embrassée pour carrière. Enfin, c’est une formidable déclaration d’amour et d’admiration de l’auteur à son grand père. Et rien que pour cela, je trouve qu’il était bon de lire ce livre.  

 

Quatrième de couverture

 

« C’est un fait : notre époque n’a plus le sens de l’honneur. Et c’est pourquoi, ayant perdu le goût de l’audace et du panache, elle est parfois si ennuyeuse. Alors que le cynisme et le scepticisme progressent chaque jour dans les esprits, il m’a semblé nécessaire d’évoquer les hautes figures de quelques hommes que j’ai eu la chance de connaître et de côtoyer. Comme Athos ou Cyrano, c’étaient de très grands seigneurs. Ils avaient sauve l’honneur de notre pays en 1940. Gaulliste de la première heure, mon grand-père maternel était l’un d’entre eux. Sa vie passée à guerroyer, en Afrique, en Europe ou en Extrême-Orient, pleine de fracas et de combats épiques dont on parle encore aujourd’hui, est l’illustration d’une certaine idée de l’honneur. Qu’aurait-il pense de notre époque ? Je ne le sais que trop. C’est vers lui que je me tourne naturellement lorsqu’il m’apparaît que mes contemporains manquent par trop d’idéal. Ce héros d’hier pourrait-il, par son exemple, nous inspirer aujourd’hui ? C’est dans cet espoir, en tout cas, que j’ai eu envie, soudain, de revisiter sa grande vie ».

 

Et le style dans tout ça ?

 

J’ai beaucoup aimé le style. Fluide, plaisant et dans une très jolie langue. Il y a dans certains passages des envolées lyriques qui ont fait l’effet de petits feux d’artifice dans mon cerveau. D’ailleurs, j’ai pas mal corné ce livre pour marquer mes passages préférés. C’est plutôt bon signe non ?

 

Verdict

 

« La France, hier soldat de Dieu, aujourd’hui soldat de l’humanité, sera toujours le soldat de l’idéal ». Clémenceau cité par l’auteur. 

Ce livre ne pouvait que plaire à la réserviste que je suis. Le thème de la grandeur de la France et son armée me tient à coeur. J’ai donc toujours beaucoup de plaisir à lire des livres qui retracent la trajectoire d’un héros au service de son pays. Mais ici, plus encore que cela, c’est l’amour et l’admiration sans borne d’un petit-fils pour son grand-père qui m’a touchée. 

 

Je le recommande ? 

 

Oui, même si je ne le conseille pas forcément aux anti-militaristes ou à tous ceux qui détestent cette frange un peu vieille France et « tradi » de la population.

   

Pour qui ?

 

Tout public

 

Mes passages et citations préférés

 

« C’est un fait, et je le déplore: l’honneur n’est pas à la mode. Il n’y a là rien de très étonnant: dans une époque où le cynisme et le scepticisme commettent des ravages, nous en avons perdu le sens. Je me désole chaque jour de constater que ce mouvement de l’esprit et de l’humeur, qui fut si impérieux pour certains hommes, cette injonction perpétuelle, qui vous intime de vous tenir droit, vous rappelle sans cesse à l’ordre, dans la vie quotidienne comme dans ces moments où une décision engage toute une existence, est sur le point de disparaître, expulsé de notre imaginaire, de nos sensibilités, de nos mentalités, un peu comme le seraient les banlieues de notre conscience.
 
« A-t-on conscience, à trente et un ans, des conséquences de ses actes lorsqu’ils sortent de l’ordinaire du fait de circonstances exceptionnelles ? Et surtout, les scrupules de prudence peuvent-ils tenir longtemps lorsque le souffle de l’épopée passe devant vous ? »
 
« Dans les Sept Piliers de la sagesse, T.E. Lawrence écrit quelque part que les penseurs, les prophètes et les ermites ne se réfugient pas dans le désert pour y trouver Dieu, mais pour y entendre plus distinctement dans la solitude le verbe vivant qu’ils y apportent avec eux. Je suis convaincu de la vérité de cette observation ».
 
« J’aime infiniment ce type de situations improbables, ces instants, rares et parfois incongrus, dans une existence où la réalité, avec tout ce qu’elle peut comporter de trivial, rattrape et rencontre la grande histoire. J’y vois, dans sa souveraine liberté, le principe même de la vie, que la fantaisie vient alors sertir et rehausser avec une exubérance qui n’est jamais vulgaire. Dans ces moments là, il me semble que la vérité de l’instant s’accroît de la force de la réalité pour atteindre la vérité romanesque, qui, elle, est universelle ».
 
« Quand vous sentirez votre énergie fléchir, rappelez-vous Koufra, Alençon, Paris, Strasbourg. Retrouvez vos camarades, recherchez vos chefs et continuez en répandant dans le pays le patriotisme qui a fait notre force ». On ne saurait trouver propos plus intemporel – ni actuel ».
 
« Il y a des hommes dont la voix manque à notre époque. Aujourd’hui, c’est au fond des bibliothèques, dans le silence et la pénombre des salles de lecture désertées, que nous pouvons parfois entendre ces hommes nous murmurer ce que fut leur vie. C’est par les bibliothèques que nous trouverons le salut ».
 
« En vérité, les hommes constituant le personnel politique de l’après-guerre, souvent issus de la IIIe République, avaient, on le sait, retrouvé avec une intense jubilation et une immense volupté les délices et poisons de la vie qu’ils aimaient mener : leurs si subtiles combinaisons, leurs laborieuses mais prometteuses tractations, leurs convictions à géométrie variable, sans oublier les incessantes trahisons, si peu condamnables à leurs yeux d’un point de vue moral qu’elles étaient justifiées par la nécessité de nouer des alliances de circonstances afin de pouvoir gouverner ».
 
« Je pressentis ce soir là qu’il pouvait exister, quelles que fussent les horreurs de toute guerre, une forme de grâce militaire, faite d’intelligence dans la conception de la manoeuvre et de beauté dans son exécution ». 
 
« Le sens de l’honneur ne se théorise pas : certains êtes l’éprouvent en eux et agissent en conséquence, et c’est aussi simple que cela ».
 
« C’est la grandeur de nos démocraties avancées que d’essayer de prévenir et de résoudre les conflits par la diplomatie et la négociation. Mais l’honneur commande de dire non l’essentiel est en cause. Or il n’y a pas de grandeur sans honneur ». 
 
« C’est l’armée qui, par l’extraordinaire diversité de son recrutement, en se substituant aux élites traditionnelles, avait régénéré la société dans les deux cas, lui insufflant un sang neuf, lui transmettant la vigueur, l’énergie et l’audace, ainsi que ce code de l’honneur, fait de naïveté et d’obéissance, qui lui est propre ».
 
« Il m’a enseigné, sans faire de phrases, simplement par son exemple, que certains êtres ne peuvent vivre sans un idéal qui les dépasse. Certaines époques et certains lieux permettent, mieux que d’autres d’assouvir cette aspiration de l’esprit à s’élever ».

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