Lectures

Pietra Viva de Léonor de Récondo : un hymne à la beauté

19 août 2017

 

Pourquoi ce livre ?

 

On ne le répètera jamais assez : on a besoin de (bons) libraires. Le tout-dématérialisé et le tout-internet ne remplaceront jamais le conseil avisé d’un professionnel qui vous connaît. À Tours, j’ai une libraire attitrée : Elizabeth. Elle est tellement formidable dans ses recommandations que je ne rentre pas dans la boutique lorsqu’elle n’est pas là. Il n’est pas rare que j’aille à la Boîte à Livres sans idée précise. Pourtant, elle a toujours quelque chose de génial à me faire découvrir, généralement un peu « hors des sentiers battus ». Au fil des années, ses préconisations se sont affinées à mesure que je lui communiquais mes retours sur les livres. On n’imagine pas à quel point cela est précieux : c’est comme avoir une personal shopper pour les livres. 

C’est comme ça qu’un jour, elle a attrapé un petit livre à la couverture plutôt peu attirante. C’était Pietra Viva. Elle m’a dit : « vous qui aimez la belle écriture, vous allez adorer ce livre. C’est bouleversant de beauté. De la pure poésie« . Elle m’a ensuite parlé des Éditions Sabine Wespieser. Elle publie peu mais c’est toujours du hautement qualitatif. En effet ! On se trompe rarement avec un ouvrage publié par Sabine Wespieser Éditeur

 

Quatrième de couverture

 

« Michelangelo, en ce printemps 1505, quitte Rome bouleversé. Il vient de découvrir sans vie le corps d’Andrea, le jeune moine dont la beauté lumineuse le fascinait. Il part choisir à Carrare les marbres du tombeau que le pape Jules II lui a commandé. Pendant six mois, cet artiste de trente ans déjà, à qui sa pietà a valu gloire et renommée, va vivre au rythme de la carrière, sélectionnant les meilleurs blocs, les négociants, organisant leur transport. Sa capacité à discerner la moindre veine dans la montagne a tôt fait de lui gagner la confiance des tailleurs de pierre. Lors de ses soirées solitaires à l’auberge, avec pour seule compagnie le petit livre de Pétrarque que lui a offert Lorenzo de Medici et la bible d’Andrea, il ne cesse d’interroger le mystère de la mort du moine, tout à son désir impétueux de capturer dans la pierre sa beauté terrestre. Au fil des jours, le sculpteur arrogant et tourmenté, que rien ne doit détourner de son oeuvre, se laisse pourtant approcher : par ses compagnons les carriers, par la folie douce de Cavallino, mais aussi par Michele, un enfant de six ans dont la mère vient de mourir. La naïveté et l’affection du petit garçon feront resurgir les souvenirs les plus enfouis de Michelangelo. Parce qu’enfin il s’abandonne à ses émotions, son séjour à Carrare, au cœur d’une nature exubérante, va marquer une transformation profonde dans son œuvre. Il retrouvera désormais ceux qu’il a aimés dans la matière vive du marbre ».

 

Verdict ?

 

J’ai tellement aimé que j’ai ensuite lu tout ce que Léonor de Récondo a écrit : La grâce du cyprès blanc (dont je vous ai déjà parlé), Rêves oubliés et, plus tard, Amours.

 

Pourquoi j’ai aimé ce livre …

 

D’abord, vous connaissez mon amour immodéré de l’Italie. Ensuite j’adore la période Renaissance. Un roman structuré autour de Michel-Ange ne pouvait que susciter ma curiosité. Je n’étais pas certaine d’adhérer à l’histoire : il était beaucoup question de sculpture dans le résumé et je ne suis pas du tout une férue d’art. Mais ce livre, c’est tellement plus qu’une histoire de taille de marbre ! C’est un récit profond sur la nature humaine, les affres de la mémoire, le caractère déterminant d’une rencontre … Et même pour les profanes comme moi, le rapport de l’artiste à son art est décrit avec une telle justesse qu’une vive émotion se dégage immanquablement de ces pages. Lire Pietra Viva est une puissante expérience sensorielle. 

J’ai aimé aussi l’évocation du génie tourmenté, hanté même, qui s’en sortira par son art et par ses rencontres dans la carrière de marbre.   

 

Et le style dans tout ça ?

 

Si vous avez lu ma chronique sur La grâce du cyprès blancvous savez que je suis totalement conquise par l’écriture délicate, fluide et merveilleuse de Léonor de Récondo. Elle est musicienne avant d’être écrivain et cela se sent. Sa prose est presque une musique. J’aime surtout sa simplicité et sa finesse. Combien d’auteurs nous assomment à coup de phrases et tournures pompeuses et nous infligent leur style prétentieux ? Dans Pietra Viva, rien de tout cela, bien que la langue soit parfaitement maîtrisée et les phrases absolument sublimes.

Enfin, si je devais résumer ce roman en deux mots ce serait : beauté et poésie. Ce livre est vraiment superbe.

Lisez-le, vous adorerez ! 

 

Pour quel public ? 

 

Pietra Viva fait partie de ces livres que j’offre beaucoup autour de moi. Je n’ai jamais eu de retour négatif. Chez moi, il a été lu par trois générations et a fait l’unanimité. Les thèmes qui y sont abordés, tout en subtilité, sont universels et susceptibles d’avoir une résonance auprès d’un large public.

Pour achever de vous convaincre, je vous recommande la lecture de la très belle chronique d’Olivia de Lamberterie parue dans Elle, ainsi que la revue de presse recensant les critiques sur ce bel ouvrage.

 

Mes morceaux et citations préférés :

 

« À force de côtoyer leurs rires et la montagne, la fièvre de la pierre était entrée en lui et ne l’avait plus quitté ».
 
« En fermant la porte de sa chambre derrière lui, le sculpteur ne comprend pas encore ce qui l’étreint. Il sent simplement que quelque chose en lui a bougé. Imperceptiblement, une émotion se fait une place. Infime et pourtant bouleversante ».
 
« Son esprit créateur a su miraculeusement extraire de son imagination plusieurs personnages. Il faudra trouver les blocs justes et les déshabiller afin qu’apparaissent, dans leur nudité première, les esclaves de la pietra viva ». 

 

« Affolée par cette extase amoureuse, sa conscience le réveille en sursaut. Elle efface en un instant sa vision idyllique. Le sculpteur ferme les yeux pour tenter de la rattraper, mais l’image fugace du paradis incarné s’est échappée en laissant, comme unique souvenir, une ardeur où se mêlent vin et bonheur ».

 

« Il se sent porté par la joie contagieuse de la flore qui explose sous les rayons de mai et par l’espoir de ce nouveau printemps ». 
 
« II plonge ainsi dans la nuit et ses rêves, bercé par l’espoir que cette joie si profonde soit toujours là, à portée de coeur ».
 

Pour la petite histoire …

 

J’ai rencontré l’auteur quelques mois après avoir lu Pietra Viva. Elle était en tournée-promo dans les librairies de France et de Navarre pour Amours, Grand Prix RTL – Lire 2015. Un privilège de l’entendre lire des passages de ses oeuvres. Quand on la rencontre, on perçoit la parfaite adéquation du personnage au style de ses livres. C’est par ailleurs une jeune femme très sympathique, ce qui ne gâche rien.

Vite, un autre roman !!!

 

* * * *

Lu en juin 2014 en quelques heures – Sous un arbre du jardin.

 

 

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